Acteur majeur du jeu politique camerounais malgré son exclusion rocambolesque de la présidentielle du 12 octobre 2025, Maurice Kamto a entrepris depuis le 11 septembre 2025 des concertations avec les 11 candidats de l’opposition retenus pour ces joutes électorales. L’objectif est d’aboutir à une candidature consensuelle de cette opposition susceptible d’ébranler le Président sortant, candidat du Rdpc au pouvoir. Ce ne sera pas une sinécure…
La tâche ne sera sans doute pas facile au regard du passage en force que vient d’opérer l’Union pour le changement (Upc) de Sam Mbaka, Anicet Ekane et DjeukamTchameni qui ont pris sur eux de choisir parmi les plus en vue des candidats de l’opposition, celui qui leur convient, en la personne de Issa Tchiroma Bakary, Présidentnational du Fsnc. Ce zèle a certainement contribué à compliquer la donne en rapport avec une candidature consensuelle de l’opposition, si tant est que cette coalition pour qu’elle soit forte et crédible, elle doit s’appuyer sur des leaders forts et ayant une assise électorale viable. Bello BoubaMaigari et Issa Tchiroma Bakary sont donc ces figures de proues susceptibles de conduire cette collation de l’opposition lors de la présidentielle du 12 octobre 2025. Sauf que, à cause du tempérament voire de la précipitation de certains acteurs, l’idée d’une mutualisation des forces de l’opposition s’effrite de plus en plus ces derniers jours, en plus de ce que la campagne électorale officielle s’ouvre le 27 septembre prochain. Le temps presse certes, mais faut-il se fourvoyer pour une cause fusse-t-elle noble ? Maurice Kamto a décidé de s’engouffrer dans une caverne au risque de n’en sortir sans réels résultats salutaires pour cette opposition qui à juste titre, a été qualifiée de la « plus bêted’Afrique », ceci à cause des égos démesurés, de l’égocentrisme voire de l’égoïsme transactionnel de ces leaders.
EN FAIT
C’est par un communiqué sur sa page Facebook, que le leader du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) a informé les camerounais sur l’initiative qu’il a prise en vue de produire un candidat plus et sérieuxsusceptible de rivaliser efficacement avec le Président Paul Biya, en lice pour un 8ème mandat à la tête du pays. Le 11 septembre dernier, Maurice Kamto a déclaré : « J’ai reçuce jour à mon domicile le président national de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp), Monsieur Bello BoubaMaigari, candidat à l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. Ce dernier était accompagné de deux de ses collaborateurs. Les échanges se sont déroulés dans une atmosphère empreinte de cordialité ». Signalons que les tractations avec Bello Bouba et Maurice Kamto avaient déjà commencé longtemps avant la démission du leader de l’Undp du gouvernement. Puis, le lendemain, c’est-à-dire le 12 septembre 2025, c’était au tour de Issa Tchiroma Bakary, Président national du Front pour le salut national du Cameroun (Fsnc) de se rendre au domicile de Maurice Kamto, sis à Yaoundé, au quartier santa barbara. Puis après, le 14 septembre dernier, c’était le tour du bâtonnier AkereMuna de l’Univers, de se plier à la cause de l’impératif de cette large concertation.
Ce casting n’est pas anodin, si tant est que la coalition éventuelle de l’opposition se fera obligatoirement avec ces deux leaders du septentrion, sinon elle sera une coalition des faibles, sans grande efficacité. Sur son compte Facebook, l’honorable Jean Michel Nintcheu a précisé que « Maurice Kamto recevra les candidats à l’élection du 12 octobre ». Cette démarche de Maurice Kamto n’est pas du goût du parti au pouvoir qui croyait avoir fini avec son plus redoutable adversaire politique, en l’écartant de la course à la présidentielle. Sauf que fort de son assise populaire de nature à être un véritable faiseur de roi, Maurice Kamto reste malgré certains, un acteur majeur de compétition électorale au Cameroun. Il ne sera point besoin d’aboutir à une coalition large voire à une candidature unique de l’opposition qui reste un leurre dans notre contexte. Mais il faudra que les candidats forts de l’opposition s’entendent afin de mutualiser leurs forces. La soif de changement est quasi majoritaire dans notre pays.

AUBAINE
Paul Biya, après 43 ans de règne, donne des signes évidents de fatigue visible par ses nombreuses absences au sein des milieux importants qui engagent l’avenir de notre pays. Le cas le plus récent est son absence aux assises de la Communauté des états de l’Afrique centrale (Ceac) tenues à Malabo en Guinée équatoriale, et celles de la Cémac tenues à Bangui en République centrafricaine du 10 au 12 septembre dernier. Paul Biya agit plus que par des personnes interposées que par lui-même qui pourtant a été élu. Même les concertations entamées au palais de l’Unité le 02 juillet 2025, en vue de mettre sur pied son plan stratégique de campagne électoral, ont été conduites sur très hautes instructions, par le Ministre d’Etat, Ferdinand NgohNgoh, ci-devant Secrétaire général de la Présidence de la République (SgPr). L’initiative de Maurice Kamto tire son essence sur l’opportunité majeure que constitue cette échéance électorale, d’aboutir à une alternance démocratique dans notre pays, ceci du fait d’une très grande lassitude de l’immense majorité des camerounais à continuer sous le régime du renouveau. Mais pour y parvenir, il faudra s’associer ou alors périr. Certains candidats dit de l’opposition se sont d’ores et déjà désolidarisés de toutes tentatives d’union de l’opposition. Ceux-ci estiment les yeux voilés qu’ils peuvent individuellement vaincre la machine électorale et politique d’un parti aussi vieux que celui du Rdpc qui s’appuie sur les autorités administratives pour survivre.
EN RAPPEL
François Soudan, ci-devant Directeur du Magazine Jeune Afrique avait renforcé le constat qui, malgré sa vraisemblance, est perçu comme le mot violent au service de la vérité pour la sagesse. En affirmant que : « Après l’élimination de l’opposant le plus crédible face à Biya, il n’en reste plus rien comme enjeu aux élections du 12 octobre 2025. Les 11 candidats qui restent sont à la recherche du meilleur perdant. L’opposition camerounaise peut être considérée comme la plus bête d’Afrique… », le patron de Jeune Afrique, a mis certains leaders devant leurs responsabilités historiques. Cette vérité est si blessante, car nombre de ces supposés opposants, se servent de la politique comme moyen de rente, un business pour remplir leurs poches au détriment du changement souhaité par le peuple majoritaire. Les propos de François Soudan ont été comme un électrochoc pouvant remettre l’objectif principal des acteurs politiques, au centre du jeu et des enjeux électoraux au Cameroun, à savoir l’intérêt supérieur du peuple du changement, et par ricochet l’aboutissement à une alternance démocratique dans notre pays.« C’est tout le peuple camerounais qui peine à faire corps, qui peine à se mouvoir à l’unisson et qui peine à se transformer en un collectif, en une communauté de sécurité capable de s’auto-défendre. Et donc, il manque ce terreau, ce matériau fondamental que constitue un peuple réveillé qui peut se mettre debout par-delà, justement, sa pluralité, sa multiplicité. Et la satrapie, pendant 43 ans, s’est efforcée justement de rendre impossible ce mouvement. Peut-être, un jour ce peuple deviendra-t-il un collectif. », a affirmé AchilleMbembele 27 août 2025 sur les antennes de Rfi, rajoutant au constat quasi général sur l’issue de la présidentielle du 12 octobre 2025.
L’un des érudits camerounais, par ailleurs Directeur de la Fondation de l’Innovation pour la démocratie, créée par le Président français, Emmanuel Macron, en 2022, d’autant plus que malgré la soif immense de changement qui habite les camerounais, ceux-ci sont quasi amorphes et nonchalants. Cette attitude est accentuée par une classe politique moribonde. Pour sa part, SM Sokoudjou Jean Rameau, ci-devant chef traditionnel Bamendjou, département des hauts-plateaux, région de l’Ouest, et le plus ancien monarque encore en activité, a prodigué ces quelques conseils aux acteurs politiques de l’opposition, leur demandant fermement de s’unir, de mutualiser leur force, à défaut de s’éteindre politiquement.
NO MAKE ERREUR
BelloBouba et Issa Tchiromasontface à leurs responsabilités. Le changement viendra par le Nord du pays. Une coalition des faibles ne peut aboutir à rien. Face à l’urgence, et à l’opportunité qui s’annonce, de transformer les espoirs des camerounais en réalité, l’opposition camerounaise peine à trouver un candidat consensuel, capable de damer le pion à Paul Biya. Les concertations opportunes voire tardives de Maurice Kamto, sont une ultime chance pour cette opposition de s’assagir, de montrer leurs hauts degrés de responsabilités, en mutualisant objectivement leurs forces. La guerre des égos fait rage. La danse du ventre de certains offusque ostensiblement, du fait du ridicule suscité.
SPECIFICITES
Des 11 candidats de l’opposition, seuls deux voire trois d’entre eux, peuvent faire vaciller le système, s’ils réussissent à s’entendre. Il s’agit de Bello BoubaMaigari de l’Undp, et Issa Tchiroma Bakary du Fsnc. Tous deux ont servi le régime d’Ahmadou Ahidjo. Ils ont tous deux payé le prix des représailles suite au coup d’état manqué du 06 avril 1984. Tous deux sont membres fondateurs de l’Undp. Ils sont tous deux originaires du Nord (Garoua). Tous sont septuagénaires et anciens membres du gouvernement. S’ils réussissent à s’entendre pour ne présenter qu’un candidat, Maurice Kamto n’aura pas d’autres choix que s’allier derrière ce candidat pour booster le changement. Il va s’en dire que Bello Bouba et Issa Tchiroma n’ont pas droit à l’erreur, sinon, ils porteront l’entière responsabilité de l’échec du changement dans notre pays. Parce que le septentrion du pays vaut en principe 40% de l’électorat camerounais, constitué d’environ 8 millions d’électeurs.
En 2018, cette partie du pays avait contribué à hauteur de plus de 70% du bétail électoral favorable à Paul Biya. Pourtant, ces 3 régions sont les plus pauvres du pays, selon les statistiques de l’Institut national des statistiques (Ins). Avec l’ajout de plus de 02 millions d’inscrits sur le fichier électoral, et fort de l’union impérative Bello Bouba et Issa Tchiroma, le Rdpc au pouvoir aura certainement toutes les difficultés du monde à faire gagner son candidat dont il est loisible de constater que son bilan en 43 années d’exercice du pouvoir, est désastreux. Bello et Tchiroma ne sont pas encore chacun en ce qui les concerne, prêts à s’effacer pour l’autre. Et pourtant, c’est la voie préalable. Ils doivent donner l’exemple, ou alors périr politiquement. Pour sa part, le candidat AkéréMuna de l’Univers, s’est ouvertement dit favorable à la cause d’une véritable mutualisation des forces. Il l’avait démontré en 2018 en se ralliant même à la dernière minute, au candidat Maurice Kamto. Même si sa position ne semble pas acquise par le leader de l’Univers, AkéréMuna, Joshua Osih du Sdf, Tomaino Ndam Njoya de l’Udc, Kwemo Pierre de l’Ums, Serges Espoir Matomba du Purs, Bougha Hagbe du Mcnc, Seka Caxton du Pal, Hiondi du Fdc, Cabral Libii du Pcrn pris individuellement ne pourront pas dépasser 05% des suffrages valablement exprimés. Voilà pourquoi, il faut absolument que Maurice Kamto réussisse dans sa mission, lui qui est animé et porteur de grands espoirs pour le peuple du changement dans notre pays.
Eric V. YAKAM